William S. Davis, lycéen de San-Diego - 17 ans
Tijuana ? Y’a pas à dire c’est le pied ! En terme d’ambiance et de fêtes y’a pas mieux, un Las-Vegas à la frontière où tout est permis ! Dans notre pays on nous emmerde au sujet de l’alcool et de la majorité, là-bas on a pas ce problème au moins. Casinos géants, bars à profusion et clubs où on peut entrer super facilement, le paradis sur terre, un week-end là-bas et jpeux vous dire que vous saurez ce que signifie s’amuser. Mes potes et moi on se fait régulièrement des virées au Mexique, à la fin des vacances d’été c’est un rituel de passage, vous retrouverez tous les jeunes de Californie à siroter un cocktail dans un bar de Tijuana ! Si nos vieux sont au courant ? Bon sang, bien sûr que non ! Ils sont persuadés qu’on va camper dans l’Oregon alors qu’on met le cap sur le sud. On ment pas vraiment disons …Qu’on les préserve ouais c’est ça ! Bah c’est vrai que certains disent que ça peut être dangereux mais tout ça c’est des rumeurs, j’ai jamais eu de problèmes là-bas faut pas s’aventurer dans les quartiers craignos puis c’est tout. Ce que j’appelle craignos ? ‘Fin vous savez ces espèces de slums dans lesquels ils sont entassés avec toute leur ribambelle de gosses. Après moi jm’en fou du moment qu’ils restent là-bas et ne viennent pas chez nous. Raciste ? Non du tout ! Vous savez j’ai une tonne d’amis mexicains…D’ailleurs ils font de supers burritos, si je dois bien reconnaître un truc à ces mexicanos c’est qu’ils s’y connaissent en bouffe !

Maria A. Alvarez, étudiante à Tijuana - 19 ans
Je…Je ne sais pas, à dire vrai je ne suis encore jamais allée à San-Diego, vous savez on ne passe pas la frontière sans une bonne raison. Mon père travaille dans une usine tout près de la Californie, ce que vous appelez « maquiladoras » oui. Je vois souvent des jeunes américains dans le centre-ville, ils aiment venir s’amuser ici, traîner dans les bars et flirter à tout va, ils semblent tellement insouciants j’avoue que parfois je les envie. Ma mère est prof d’espagnol dans un lycée de mon quartier et elle m’a toujours poussé à viser plus haut que ce que le Mexique a à m’offrir. J’aime ma ville et je ne renierais jamais mes origines mais c’est vrai que moi aussi j’ai mon rêve américain dans un coin de ma tête. Bien sur que j’ai envie de partir d’ici, d’avoir une vie plus confortable quel mal y’a-t-il à ça ? Vous savez ces « ptits blancs » comme les appelle mon frère ils voient en Tijuana une immense fête alors que ce n’est pas que ça, si vous viviez dans mon quartier vous comprendriez mieux de quoi je parle. Je croise tous les jours des jeunes en galère, qui font n’importe quoi par ennui ou qui ont tout simplement baissé les bras, des sans espoirs, des sans avenir. C’est étrange de se dire qu’on est si proches et pourtant si différents. L’ennui avec les américains c’est qu’ils veulent le Mexique mais sans les mexicains.

San-Diego, Tijuana, qui n’a jamais entendu parler des célèbres villes jumelles où le soleil brille les trois quart de l’année ? Si différentes et pourtant complémentaires. Illustration parfaite de la mexamerica où est né ce mur infranchissable, cette interdépendance entre les deux côtés de la frontière. Si la première est la deuxième plus grande ville de Californie, berceau historique de l’état connue pour ses plages paradisiaques ; la seconde elle, accueille touristes en grand nombre et entreprises américaines à la recherchent de main-d’œuvre bon marché. San-Diego métropole qui attire de plus en plus de monde mais aux mentalités parfois fermées qui rejettent toute différence. Tijuana ville nocturne, antre des plaisirs et des vices car si la ville est de plus en plus dynamique et accueillante elle a également une face bien plus sombre. Envahie par les magasins spiritueux, les trafics illicites et les maisons de prostitutions. Villes jumelles, villes en contrastes, villes en opposition. Reflet abîmé où la violence se fait écho. Allons bon, de quel côté serez-vous ? Cela n’a que peu d’importance au final. Mexicains, californiens…Traversez la frontière, embrassez vos péchés.